le compositeur et l'œuvre

 

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Chronologie simplifiée

1911 Naissance le 19 septembre à Västra Ryd, Uppland, Suède. Enfance dans les quartiers sordides de Stockholm

1930-1939 Etudes au Conservatoire Royal de Musique de Stockholm

1939-1940 Etudes d'alto à Paris auprès de Maurice Vieux

1951-1953 Etudes de composition à Paris auprès de René Leibowitz et Arthur Honegger

1966-1967 Composition de la Septième Symphonie

1968 Première mondiale triomphale le 13 octobre, par l'Orchestre Philharmonique de Stockholm sous la direction d'Antal Dorati

1980 Décès le 20 juin.

 

Le compositeur

Allan Pettersson est considéré dans les pays anglo-saxons comme le plus grand compositeur suédois et fait partie du club restreint des grands symphonistes du 20ème siècle à l'instar de Gustav Mahler ou Dimitri Chostakovitch.

Pour autant, 20 ans après sa mort son œuvre est très peu jouée voire reste complètement ignorée au-delà de l'Europe du Nord et des Etats-Unis.

Révélé au grand public par le chef d'orchestre de réputation internationale Antal Dorati, Allan Pettersson a, il faut le reconnaître, accumulé les motifs d'isolement.

A une enfance misérable, à son caractère ombrageux, s'est ajouté à partir des années 50 et de manière très douloureuse et handicapante à partir des années 60, une polyarthrite rhumatoïde qui eut pour effet de raidir, déformer et détruire progressivement ses articulations, jusqu'à le laisser infirme.

Tempérament combatif profondément marqué par son enfance dans les quartiers sordides de Stockholm, "élevé" par un père alcoolique et une mère bigote, il a réussi à force de volonté à vaincre la fatalité de son destin et à devenir ce qu'il souhaitait être, un compositeur dont l'œuvre a une portée universelle.

Il a traduit dans sa musique, soit 17 symphonies, 3 concertos pour orchestre et soliste, 3 concertos pour orchestre, 2 cycles de mélodies et de la musique de chambre, la rage de vivre des faibles et des opprimés, et sa compassion pour leur destin.

 

La Septième Symphonie

Pour que sa musique soit reconnue, il fallait à Allan Pettersson vaincre deux obstacles.

Le premier était l'appréhension du public envers des œuvres émotionnellement et socialement "engagées", parfois physiquement éprouvantes par leur agressivité et leur longueur. Cette dernière difficulté ne vaut pas pour toutes ses œuvres, mais la symphonie n°13 de 1976 (67' dans la version d'Alun Francis) ou le concerto pour violon n°2 de 1977 (56' dans la version Haendel/Blomstedt) sont des chefs-d'œuvre qui représentent des défis marathoniens pour les interprètes, et qui exigent une participation active de l'auditeur.

Le second obstacle fut le scepticisme de la critique musicale d'après-guerre pour le recours au genre symphonique, grande forme que chacun s'accordait à penser comme définitivement morte depuis la deuxième guerre mondiale. Cinquante ans plus tard, la quasi-disparition des dogmatismes dans la société occidentale semble devoir apporter à l'œuvre d'Allan Pettersson une rémission salutaire.

Deux courtes citations du compositeur paraissent apporter un éclairage intéressant sur la Septième Symphonie.

En 1968, peu après la composition de la symphonie, Allan Pettersson écrivait à Leif Aare, son ami et biographe (publié dans Nutida Musik), dans le style sans détours qui était le sien : "L'homme d'aujourd'hui, c'est un petit enfant qui meurt de faim sur cette terre, en cette minute précise, et la musique d'aujourd'hui, c'est le geignement de cet enfant dans cette foire pour charognards. C'est ce qui en a fait l'homme adulte, l'homme difforme et graisseux".

La citation la plus fréquemment reprise par les biographes du compositeur s'applique également de très près à la Septième Symphonie, œuvre de lutte et de chant : "L'œuvre à laquelle je travaille est ma propre vie, celle qui est bénie, celle qui est maudite : je m'y abandonne afin de retrouver le chant que l'âme a chanté autrefois".

 

La discographie

La discographie de l'œuvre d'Allan Pettersson est récente mais d'ores et déjà globalement satisfaisante, grâce à des chefs remarquables comme Antal Dorati ou Alun Francis, voire franchement inspirés tels que Thomas Sanderling dans la Huitième symphonie (CPO) ou Sergiu Comissiona dans la Septième Symphonie (Caprice).

La discographie de la Septième Symphonie a donné lieu à quatre enregistrements entre 1967 et 2000.

La version pionnière d'Antal Dorati de 1969 avec l'Orchestre Symphonique de Stockholm est valeureuse, et donne à l'œuvre des intonations de grand classique, un témoignage historique et un bon second choix encore aujourd'hui.

La version analytique de Gerd Albrecht en 1991 avec l'Orchestre Philharmonique de Hambourg propose probablement les plus beaux alliages sonores, mais cela ne suffit pas à donner une version de référence.

Le bouillonnant Leif Segerstam est traditionnellement un chef très honnête dans l'interprétation d'Allan Pettersson, et son enregistrement de 1992 avec l'Orchestre Symphonique de Norrköping ne paraît pas échapper à la règle.

Mais c'est du côté du chef roumain Sergiu Comissiona en 1990 avec l'Orchestre de la Radio Suédoise que l'on trouve la plus belle version de l'œuvre, pour ne pas dire le plus bel enregistrement d'une œuvre d'Allan Pettersson. Non que le son ou l'orchestre soit d'une qualité exceptionnelle, mais l'essentiel, l'esprit, l'onirisme, soufflent de bout en bout.

Leif Aare, le seul ami et le biographe du compositeur, également auteur d'un très intéressant documentaire pour la télévision suédoise, considère ainsi que Sergiu Comissiona a réussi dans cet enregistrement à faire tomber les barrières rigides de la structure de la symphonie, pour atteindre l'état du pur flux musical.

Jean-Luc Caron, Président de l'Association Française Carl-Nielsen considère également cet enregistrement comme le plus réussi.

 

Après la Septième Symphonie

Après la Septième Symphonie de Pettersson, cinq œuvres sont immédiatement recommandables pour qui souhaite aller plus loin dans la connaissance de l’œuvre de Pettersson :

- Le Concerto pour violon n°2, interprété par Isabelle van Keulen et dirigé par Thomas Dausgaard (CPO). Avec la 7ème, c’est l’œuvre qui incarne le mieux l’art de Pettersson. Elle commence par une première demi-heure de lutte entre le soliste et l’orchestre, représentation limpide de l’individu luttant pour sa survie contre la société, avant de se poursuivre  par un long chant réconciliateur de toute beauté. Le concerto constitue un défi technique pour les interprètes et une aventure passionnante pour l’auditeur. En France, cette interprétation a été récompensée d’un « 10 Classica-Répertoire » et d’une « Clef ResMusica » (lire l’article).

- La Huitième Symphonie par Thomas Sanderling (CPO), la plus proche de la Septième dans l'esprit et dans la durée. Interprétation précise et poétique.

- Troisième et Quatrième Symphonies, par Alun Francis (CPO), plus concises et moins lyriques que les symphonies 6 à 9, Pettersson y apparaît comme un maître de la composition. Excellentes interprétations.

- Sixième Symphonie, par Manfred Trojan (CPO), œuvre au long cours de plus de 60 minutes, elle exige de l'auditeur qu'il se laisse entraîner dans l'univers du compositeur. En cela elle mérite de ne pas être abordée en phase d'initiation. Manfred Trojan pourrait probablement tirer beaucoup plus de cette œuvre, mais le message passe.

Les Neuvième et Treizième Symphonies  sont de superbes œuvres, ambitieuses, mais dont la durée de près d'une heure rend préférable de les aborder dans un second temps.

 Bibliographie et discographie

Pour le centenaire d'Allan Pettersson en 2011, ResMusica.com a consacré un dossier à Allan Pettersson, que j'ai réalisé avec Jean-Luc Caron : Dossier Centenaire Allan Pettersson. Il comprend une analyse du destin de Pettersson, une discographie et deux entretiens avec deux personnalités remarquables, le chef Christian Lindberg et le peintre Manel Pujol Baladas.

Jean-Luc Caron, spécialiste de la musique nordique, Président de l'Association Française Carl-Nielsen, rédacteur à Classica-Répertoire et ResMusica (lire ses articles), a publié la première biographie consacré à Pettersson : Allan Pettersson, le musicien de la douleur et de l’angoisse, 2007, éditions L’Age d’Homme, 346 pages. J'ai eu l'honneur d'en écrire la préface (consultable sur Google Livres, voir ci-dessous) ResMusica.com en a publié une chronique.

 

 

Cet ouvrage se substitue à deux précédents ouvrages, disponibles auprès de l'Association Française Carl Nielsen
74 allée des Bocages, 77177 Brou-sur-Chantereine cedex,
France:

- Allan Pettersson, Bulletin numéro 5 de l'Association Française Carl-Nielsen, 1989, 124 pages.

- Allan Pettersson, 1997, 57 pages.

 

Liens vers d'autres sites Internet sur Pettersson, en anglais

Allan Pettersson Society, Suède

International Allan Pettersson Society, Allemagne

Biographie et analyse de quelques symphonies sur Classical.net

Hans van Eck et Norbert Wissing sont deux compositeurs des Pays-Bas qui s'intéressent à l'oeuvre de Pettersson. Ils ont réalisé une transcription de cinq mélodies de son cycle pour voix et piano "Chants à pieds nus" (Barfotasanger) pour petit ensemble, dont la première a eu lieu le 16 mai 2001 dans la petite salle de Concertgebouw d'Amsterdam, interprétée par Julia Bronkhorst. Sur leur site vous pourrez entendre l'enregistrement de ce concert, avec en plus la partition complète accessible librement! S'agissant de la Musique sous-titrée, ils considèrent que "c'est une bonne initiative pour amener la musiqeu au public" (message du 31 décembre 2000).

Pour mémoire, The Allan Pettersson Page, Etats-Unis